Dolomites, Pale di San Martino 2018 - 19 et 22

3 août 2022 Monte Agner, Pilastro Bee.


Le Monte Agner, surnommé “El gigante » à cause de ses dimensions phénoménales propose la plus longue voie des Dolomites avec les 1600m du Spigolo nord, quasi notre Eiger ! Il est évident que nos chemins allaient un jour nous conduire au pied du colosse ; mais pas par la voie classique. C’est le « Pilastro Bee » de la face nord-ouest, décrit comme la plus belle voie de l’Agner dans un numéro de « Vertical », qui nous attire. Il s’agit d’une voie de 20 longueurs dont l’accès nécessite déjà pas mal d’acrobaties et quelques heures d’efforts.



C’est à la frontale que nous quittons la voiture, le monstre nous domine, impressionnant. Par du terrain dépourvu de sentier, au milieu des pins mughos, nous passons un col, puis une vire expo, puis tirons deux longueurs dans une cheminée pourrie. Suite à cela, il y a encore des rampes et des couloirs à ramoner avant de redescendre une autre vire expo qui conduit au fond d’un sordide couloir au pied de la voie, ouf ! Et là, c’est toujours la question, on y va, on n’y va pas ? Le temps est beau, nous avons 6 litres d’eau et des doudounes, alors on choisit la première solution, on ne va tout de même pas revenir sur nos pas ! Matt attaque un socle de rocher pourri, on espère que ce soit mieux plus haut. Puis le caillou s’améliore, le topo que nous avons, semble juste même s’il est très brouillon. Au moins, le V ressemble à du 5 et le VI à du 6, pas comme dans les voies de Manolo (voir l’aventure racontés tout en bas de cette page). Le leader flaire vite les bons passages et le second fait la mule, ou le chameau, c’est tout de même lourd tout ce bazard. La grimpe est belle, mais il y a de temps en temps une prise qui reste dans les mains. Je serais curieux de savoir combien de gens ont réalisé cette voie ouverte en solo par Riccardo Bee en 1982 et répétée pour la première fois en 2000 !



La grimpe se passe à un bon rythme, et tout à coup, surprise, nous arrivons au bivouac Bee, plus haut que nous le pensions. Nous avons du snaker une ou deux longueurs ; tant que ça monte, il n’y a pas trop de questions à se poser. De plus, grand luxe, il y a même un piton pour s’assurer sur cette petite terrasse. Aussi, au vu de cette avance, nous sommes plutôt optimistes quant au fait que nous allons passer la nuit dans des lits plutôt qu’assis sur une vire de ce genre. Viennent ensuite les deux plus belles longueurs de la voie, cotées VI, plein gaz sur un fabuleux caillou. Un peu plus haut, le passage clé, une fissure en VII que Matt négocie fort bien avec son rack de friends alors que moi, les épaules chargées, monte comme je le peux. Puis hélas, le rocher devient moins bon, la fatigue aidant, il faut bien faire gaffe, notamment dans une grande traversée à droite qui permet de contourner un gros surplomb et sortir de la paroi.



Un peu plus de 14h après avoir quitté la voiture, nous sommes dans les pierriers sommitaux, heureux. Nous avons parcouru 2000 mètres de dénivelé et rencontré 5 pitons, ni plus ni moins. Oui, l’aventure avec un grand A, ça existe encore ; c’est l’une des raisons qui nous pousse à venir régulièrement dans ces contrées.
2 heures après, nous poussons la porte du refuge Scarpa, sur l’autre versant, les jambes en compote. E possibile mangare, dormire ? Si, si… la vie est belle.


Trilogie dans les Pale di San Martino


3.08.2019, après une (très) courte nuit, départ à la frontale sur le sentier des « cacciatore » et la voie Scalet / Biasin du Sass Maor. Suite à notre tentative de « Supermatitta » l’an passé, nous connaissons bien le terrain. C’est tout essoufflés que nous arrivons au pied de la voie après un jogging de 1000 mètres.


Les longueurs s’enchaînent en flairant le bon itinéraire et en trouvant les lunules pour nous assurer un peu. Puis vient la zone jaune surplombante où Matt, le leader joue au Mikado, je ne suis pas en reste en second avec certaines traversées. A la moitié de la voie, changement de leader, changement de caillou aussi, dans une ambiance démente. J’évolue sur un splendide rocher gris, d’abord prisu, puis lisse, en vieux VI+. Les quelques rares pitons à moitié enfoncés me prouvent que je suis encore dans le juste. Ce que j’en retiens, c’est que même si l’escalade a beaucoup évolué depuis 1964, année de l’ouverture de cette voie, on se met encore bien au taquet, on pourrait même dire qu’on fait toujours son petit solo dans certaines sections où il est impensable de prendre un vol. Puis viennent des passages de VII+ sur vieux pitons où l’on sert les prises de façon inappropriée, le poids de la journée commence à se faire sentir. Enfin vient le IX libéré par Manolo où il est plus sage d’utiliser un étrier.


Magnifique escalade impressionnante ! Nous descendons rapidement au Rifugio del Velo della Madonna pour récupérer un peu.



4.08.2019, comme nous sommes en montagne et qu’il fait beau, autant optimiser et profiter. Cap sur la Cima della Madonna et sa voie Messner. Que dire ? Que ces deux frangins-là étaient des maestros dans leur genre et que la grimpe dolomitique n’a rien à voir avec ce qui se fait chez nous, je dirais même que ce n’est plus le même sport. On se méfie du V, on craint le VI. Pourtant, avec un cerveau en état de marche, ça fonctionne et on s’en sort rapidement. Monstre plaisir, on adore ça ! Puis, après ravitaillement à la cabane, nous changeons d’hôte et passons, par une via ferrata, au Rifugio Pradidali. Nos sentiments sont mitigés, après une voie à l’éthique plus que rigoureuse, évoluer dans une orgie de câbles et de métal moches à mourir ne nous ravi pas vraiment. Cela nous a pourtant grandement facilité le trajet. Nous avons même bien rigolé en scandant que celui qui avait peur et mettait son baudrier était un…


5.08.2019, après une bonne nuit dans le bien joliment gardé refuge…, cap sur une tranche d’histoire avec la mythique voie Buhl (1950) de la Cima Canali, qu’une vieille connaissance nous avait vivement conseillé. Ce fut pour nous un excellent jogging. Respect tout de même au grand Hermann, sa ligne de fissures est vraiment majeure. Après avoir passé par le sommet et sa chaotique descente, heureusement marquée de points rouges, nous nous sommes attablés au refuge à midi précise pour un repas bien mérité. C’était notre troisième jour, il ne nous en fallait pas plus.


Il est temps de descendre, trouver un camping et une douche dans une autre vallée et attendre qu’une grosse vague d’orages passe. Nous sommes confiants pour de nouvelles aventures, nous nous y sommes bien préparés.


 


 


31.07-01.08.2018: Sass Maor, face sud-est, tentative à la Supermattita.


Sur cette espèce de grande fusée calcaire traînait un vieux rêve commun, la Supermatitta ouverte par Manolo en 1980 avec seulement 7 pitons. Nous nous sommes levés à 3 heures du mat’ et avons deviné au clair de lune l’ombre de cet El Cap dolomitique tombant sur nous. Nous avons attaqué aux toutes premières lueurs du jour et surtout bien repéré la vire de la voie Solleder, 600m plus haut qui constitue la seule échappatoire, au cas où. Argument qui a fait son poids dans le choix de nos projets.


Pour le reste, le V du topo ressemblait à du 6b, le VI à je ne sais pas quoi. Nous n’avons même pas osé imaginer le VII annoncé dans les longueurs du haut, péteuses en plus. 2-3 rares clous et lunules nous indiquaient que nous ne nous étions pas encore tout à fait perdus. C’est plus simple d’ouvrir une nouvelle voie que de vouloir répéter celle là. La joie de grimper dans cet énorme et impressionnant bouclier était pourtant bien présente.


Puis, le ciel s'est chargé doucement, nous avons réussi à repérer un SPIT d’une voie plus récente qu’il est possible de rejoindre sans être trop au taquet dans une traversée de la mort avec nos cerveaux fatigués. Par 3 longueurs de cette voie nommée « Onyx », où le V était bien du 5 et le 6b du 6b, nous avons rejoint la vire Solleder avec les premières gouttes. Là, nous avons choisi de descendre cette vire, aller manger et dormir au rifugio Velo della Madonna, plus éloigné que ce que nous pensions et revenir terminer « Onyx » le lendemain. Nous n’avions rien pour bivouaquer donc cette solution nous allait tout à fait.


Après s’être ravitaillés en bonne et due forme, pendant un nouvel orage, et reposé un peu, le réveil à sonné à nouveau alors qu’il faisait encore nuit. Puis nous sommes revenus au point atteint la veille pour sortir ce Sass Maor. Mais voilà, après un beau mur en vrai 5+ et une cheminée glauque en vrai 6, nous n’avons plus trouvé d’intérêt autre que la gaz fabuleux qui se déroulait sous nos pieds, avec du A0 dans toutes les longueurs et du rocher très péteux pour les passages de libre. Sans parler de la fatigue et du nuage noir qui commençait déjà à se former.


Entre cette voie et celle de la veille, d’une extrême à l’autre au niveau de l'équipement, il existe le style de grimpe que nous aimons.


Assez ! Retour ! Mauvais choix quant à la ligne choisie pour sortir. Pas grave, les montagnes ne partent pas et nous savons qu’il existe une autre voie, très belle semble t’il, pour sortir la paroi. Nous reviendrons, peut-être en automne, car il semblerait que le temps soit encore, ici, plus instable qu’ailleurs, les embruns marins ne sont plus si loin.


Nous avons vécus là-haut une expérience fabuleuse, mais il faut une bonne journée de récup ‘ après cela. Quant à la Supermattita, nous pouvons juste dire « bravo » à ceux qui l’ont répété complétement, ils ne doivent pas être nombreux.


Pour nous, ça sent déjà bientôt la fin, nous remontons plus près de la maison, au nord des Dolomites, au Passo di Sella.


 

Galerie photo

2000 mètres au dessus de nous se dresse le Monte Agner, appelé aussi "El Gigante"
2000 mètres au dessus de nous se dresse le Monte Agner, appelé aussi "El Gigante"

Monte Agner, sur la photo, le trait de gauche représente le Spigolo nord, la plus longue voie des Dolos avec ses 1600m. Le "Pilastre Bee" est représenté par le numéro 2.
Monte Agner, sur la photo, le trait de gauche représente le Spigolo nord, la plus longue voie des Dolos avec ses 1600m. Le "Pilastre Bee" est représenté par le numéro 2.

La looooongue marche d approche
La looooongue marche d approche

La marche se change parfois en grimpe d approche. Spigolo nord dans les 2/3 de sa splendeur, face nord ouest à droite
La marche se change parfois en grimpe d approche. Spigolo nord dans les 2/3 de sa splendeur, face nord ouest à droite

Coincés au fond d un couloir austère, les premières longueurs du Pilastro Bee
Coincés au fond d un couloir austère, les premières longueurs du Pilastro Bee

Pilastro Bee
Pilastro Bee

Pas toujours simple de porter 6 litres de liquide, plus le reste
Pas toujours simple de porter 6 litres de liquide, plus le reste


Pilastro Bee, quelques longueurs au caillou fabuleux, mais pas toutes
Pilastro Bee, quelques longueurs au caillou fabuleux, mais pas toutes

Soleil
Soleil

Soif
Soif

Le passage clé, une fissure en bon 6b+
Le passage clé, une fissure en bon 6b+

Quelle ambiance! on voit la voiture dans la forêt, 1800m plus bas
Quelle ambiance! on voit la voiture dans la forêt, 1800m plus bas


Cordée, partie en même temps que nous, sur le Spigolo nord
Cordée, partie en même temps que nous, sur le Spigolo nord


La sortie, ouf
La sortie, ouf



Toute belle ascension en Italie se termine dans un endroit conne celui-ci, rifugio Scarpa
Toute belle ascension en Italie se termine dans un endroit conne celui-ci, rifugio Scarpa

Sass Maor au levé de soleil
Sass Maor au levé de soleil

Sass Maor, voie Scalet / Biasin
Sass Maor, voie Scalet / Biasin

Sass Maor, voie Scalet / Biasin, Cima Canali en arrière plan
Sass Maor, voie Scalet / Biasin, Cima Canali en arrière plan

Sass Maor, voie Scalet / Biasin, première des trois longueurs délités, jeu de Mikado
Sass Maor, voie Scalet / Biasin, première des trois longueurs délités, jeu de Mikado

Sass Maor, voie Scalet / Biasin
Sass Maor, voie Scalet / Biasin

Sass Maor, voie Scalet / Biasin
Sass Maor, voie Scalet / Biasin

Sass Maor, voie Scalet / Biasin
Sass Maor, voie Scalet / Biasin

Sass Maor, voie Scalet / Biasin
Sass Maor, voie Scalet / Biasin

Sass Maor, voie Scalet / Biasin, on fait son petit solo
Sass Maor, voie Scalet / Biasin, on fait son petit solo

Sass Maor, voie Scalet / Biasin,
Sass Maor, voie Scalet / Biasin,

Sass Maor, voie Scalet / Biasin, la longueur finale
Sass Maor, voie Scalet / Biasin, la longueur finale

Sass Maor, voie Scalet / Biasin, la longueur finale
Sass Maor, voie Scalet / Biasin, la longueur finale

Cima della Madonna, face nord
Cima della Madonna, face nord

Cima della Madonna, face nord, voie Messner
Cima della Madonna, face nord, voie Messner

Cima della Madonna, face nord, voie Messner
Cima della Madonna, face nord, voie Messner

Cima della Madonna, face nord, voie Messner
Cima della Madonna, face nord, voie Messner

Cima della Madonna, face nord, voie Messner
Cima della Madonna, face nord, voie Messner

Cima della Madonna, vue sur le refuge du même nom
Cima della Madonna, vue sur le refuge du même nom

Sass Maor et Rifugio Pradidali
Sass Maor et Rifugio Pradidali

Cima Canali et Rifugio Pradidali
Cima Canali et Rifugio Pradidali

Cima Canali, voie Buhl
Cima Canali, voie Buhl

Cima Canali, voie Buhl
Cima Canali, voie Buhl

Cima Canali
Cima Canali

Le Sass Maor et la Cima della Madonna vus de la Cima Canali
Le Sass Maor et la Cima della Madonna vus de la Cima Canali

Cima Canali, la voie Buhl remonte la grande fissure
Cima Canali, la voie Buhl remonte la grande fissure

Sass Maor, Supermatitta, au pied du mur
Sass Maor, Supermatitta, au pied du mur

Sass Maor, Supermatitta, 2018
Sass Maor, Supermatitta, 2018

Sass Maor, Supermatitta, 2018
Sass Maor, Supermatitta, 2018

Sass Maor, Supermatitta, 2018
Sass Maor, Supermatitta, 2018

Sass Maor, le ciel s
Sass Maor, le ciel s'assombrit, on file dans Onyx, 2018

Sass Maor, Onyx et l orage arrive, 2018
Sass Maor, Onyx et l orage arrive, 2018

Sass Maor, 2018
Sass Maor, 2018

Sass Maor, 2018
Sass Maor, 2018

Sass Maor, Onyx,  2018
Sass Maor, Onyx, 2018

Sass Maor
Sass Maor