Plagne, 2024Voici la plus grande falaise du Jura avec plus de 1000 voies en 2024, « couennes » et « longues » confondues. J’en compte environ 92 sur le topo de Christophe Girardin datant de 1988. Cette évolution fulgurante est due en très grande partie par son frère Boris, qui y a consacré sa vie. Chapeau bas, merci pour tout ce boulot et cette détermination. Cette paroi longue de 2km et haute de 140 mètres au maximum reste, malgré un nombre impressionnant de couennes à chaque étage ou à chaque recoin de la falaise, un lieu réputé et exceptionnel pour grimper dans des voies de plusieurs longueurs, des « grandes » à l’échelle locale, afin de s’aguerrir aux manips de corde, au vide et se faire la conti en vue de taquiner l’Alpe. Avec certains potes, nous avons parfois grimpé 1000 mètres en un jour c’est à dire un El Cap ! Un dicton veut que quand on a appris à grimper-là, on passe partout, sous-entendu quand le rocher est délité, on sait se faire léger pour ne pas tirer toute la montagne en bas. Ça n’est pas mon rôle de faire une critique ou d’attribuer des étoiles aux différentes possibilités, tout est très personnel et l’avis d’un vieux comme moi ne correspond peut-être plus tout à fait à celui des jeunes. De plus, il y en a tellement qu’il m’est impossible de me souvenir précisément de chacune, j’ai même parfois besoin de ressortir le topo quand je viens par ici. Néanmoins, voici peut-être une petite liste de celles que j’aime bien refaire : Face de Plagne, LA voie mythique de notre région, ouverte en 1955 par Paulet et "Stift", c'est aussi la première de la falaise. Cette "voie d'examen que seuls les plus capables réussiront sans bavures" selon le topo de Maurice Brandt reste toujours exceptionnelle. Et si les "bavures" vous inquiète, emportez quelques friends, le terrain est idéal et ne devrait pas vous inquiéter, le matériel mobile, si on sait l'utiliser, est conçu pour jouir de plus de sécurité ; tout le contraire de jouer au "trompe-la-mort". Puis: The Wall, Cardinal, Pulse, Grand vide, Kevlar, Face de Rondchâtel, Stankill, Nostradamus, Nid d'aigle supérieur, Zénith, Eurêka, Labyrinthe, Tandem, et tant d’autres…
Quelques souvenirs en vrac :
Pulse, 5 longueurs, 6b+, 7a, 8a, 7c et 6a+, ouverte par mes soins en 96/97 Une voie majeure, directissime, dans l’une des faces les plus impressionnante de l’arc jurassien ; en souvenir des concerts de Pink Floyd de 1994 à Bâle et Lausanne. Elle aurait tout aussi bien pu s'appeler "les Osso Buccos" suite à un bon gag du Paulet. Sa première version a vu le jour en 1996. J’étais parti avec Boris pour une tournée d’exploration depuis le bas, tout motivé suite à mes récentes expériences de crochet / perceuse dans les premières longueurs de Baston la Baffe, de même que mes nombreuses escalades dans les Wenden. Mais cette journée de septembre s’est montrée sous de mauvaises auspices puisqu’un appel au secours a vite mis fin à notre tentative afin d’aller chercher un miraculé d’une chute au sol. L’hélico est venu et l’histoire a été close ; un peu sous le choc, nous n’avons plus trop eu le cœur à grimper ce jour-là ; même manger les cuisses de poulet préparées par la famille de Boris au chalet pour nous remonter le moral était devenu difficile, la vision des os, vous comprenez... Puis je suis revenu seul depuis le haut avec la statique afin de tracer la voie de mes rêves. Si on a quelqu’un sous la main pour grimper, autant grimper plutôt que de grailler pendant des heures. Par chez nous, l’ouverture se fait souvent seul, lorsque l’on n’a pas de partenaire. Un an passe, je me creuse la tête pour trouver le bon cheminement et une première version de la voie voit le jour, avec une grande 2e longueur en 7a qui se termine par le passage clé de la « Cardinal ». Je parviens à enchaîner le tout en 1997 (7c), mais un petit côté perfectionniste me laisse quelque peu insatisfait ; cette portion empruntée à la voisine de gauche me contrarie et laissent un goût d’inachevé. Finalement, je me résous à insérer une 3e longueur, dans la partie la plus lisse de la face, mais ne parviens pas à l’enchaîner. 10 ans plus tard, j’ai l’occasion d’y accompagner Cédric Lachat qui réussit au deuxième go et propose 8a. Attention, Pulse propose des sections engagées, à l’image des voies alpines que je consommais jusqu’à l’overdose dans ces années-là.
Stop Sika 8a+, ouverte par mes soins, 1997 Après Pulse, un autre projet un peu fou m’a attiré l’œil : le grand mur situé entre les Hirondelles et la Cardinal, passe-t ‘il ? Une bonne journée, suspendu à déchiffrer les pas et placer judicieusement les spits laisse entrevoir une solution. Résultat, de la haute voltige avec une grande longueur de 35 / 40 mètres en 8a+, plein gaz, enchainée par D. Burdet en 2005. La voie est agrémentée d’un départ du sol à gauche des Hirondelles, dans une fissure à friends en 7b+, ensuite elle poursuit par The Wall en 2e longueur avant de bifurquer à droite, un 6b expo permet de rejoindre les Hirondelles. La longueur principale débute par le pas de bloc de 7b (des Hirondelles), avant d’enchaîner là où la paroi est la plus haute, la plus lisse. Le tout se nomme Stop sika, en protestation à certains agissements qui pourrissent l’activité dans la région, et ailleurs. Toujours dans la paroi principale, mon petit big wall à domicile, que j’adore courtiser, bon nombre de voies anciennes ont besoin d’un lifting. D’abord, les Hirondelles (7b / A0) et sa sortie toujours pas libérée, ensuite la Directe (6b), l’Écusson (6c+) et le superbe Grand vide (7a), doté d’une nouvelle variante inférieure ; ma perceuse sévit souvent dans le coin après le boulot. Je ne guidais pas encore à l’époque, je bossais dans un bureau et je timbrais le plus vite possible afin d'aller m'aérer la tête.
Transit vers Sirius et Secte Appeal, 2 couennes en parallèle resp. 7a+ et 7c En 1997 toujours, un autre mur compact titille ma curiosité, il est gris-bleu, lisse, encore vierge, situé à droite de la voie dite « les Mouches ». Un accès par celle-ci, suivi d’une vire conduit au pied des hostilités. La première ligne suit plus ou moins une fissure logique alors que la seconde remonte le mur qui la borde juste à droite, elle propose une belle escalade à doigts, de force, finesse et équilibre ; très jolie ! Voies équipées et enchaînées par mes soins avec des noms qui défrayaient l’actualité de la décennie avec la secte du Temple solaire. Puis Boris exploite le secteur avec quelques rares autres lignes.
Les Agates du docteur Boggomoletz: Christophe Girardin & Nicolas Zambetti, ouverte du bas, achevée le 1er avril 1991. En souvenir d'une blague que le Paulet savait si bien raconter. Voie de type "alpine" qui remonte le pilier situé juste à droite de la Face de Plagne. Rééquipée par mes soins en août 2017 de spits Mammut inox. Voir le topo et l'historique dans la galerie photo ci dessous. Le Grand Toit: un must de l'époque, ouvert en 1957 par Hugo Weber et Willy Mottet. Un plafond de 6 mètres d'avancé, cotation magique (6 / A3), cette voie faisait partie de ce que l'on pouvait faire de plus dur dans la région. Un must! Mais comme beaucoup d'autres choses naturelles, ça vieillit plus ou moins bien (ou mal). Et cette voie n'est vraiment plus d'actualité, hormis bien sûr pour ceux qui recherchent un peu de terrain d'aventure. C'est souvent du rocher très délité, et les pitons du plafond ne sont pas vraiment dans une ligne d'escalade libre. Le reste (sucrier et toit du carré de fromage) sont quelconques, même si l'ambiance et jolie. Cela fait des lustres que nous y avions pensé, d'ailleurs, en 1990 nous avions, Boris, Julo et moi mis quelques spits dans l'espoir de libérer le truc. Mais les gros blocs instables du plafond nous en dissuadaient, et il faut bien le dire, il y avait tant de choses plus belles à faire ailleurs. Il a fallu que Boris équipe Kevlar pour que cette petite idée retrouve une place dans les choses à faire. Du coup, en rééquipant les Agates en août 2017, je suis allé mettre deux spits entre Kevlar et le Grand Toit pour grimper en libre: résultat, une chouette variante logique pour "jaunir le toit", il y a au moins deux méthodes possible, et c'est très joli. La difficulté, à voir, peut-être 7a à confirmer. Enfin, il ne faudrait pas oublier le rééquipement de la « Moebius » 7a/A0, en 1989, probablement la première fois que je me servais d’une perceuse, en compagnie de l’ouvreur himself, Toto (Gérard Thomet). Une voie aérienne dominant directement la carrière, malheureusement pas libérable à 100% à cause d’un bombé péteux comme Plagne en a le secret. Tout ça pour parler des petites incursions de ma machine à Plagne, je me suis ensuite tourné vers bien d’autres massifs jurassiens, figurants tous sur ce site. Il faut dire que suite à mes ouvertures, un accord verbal avec Boris nous a empêché l’un et l’autre de passer le Pierre-Pertuis avec de la munition dans le coffre, sauf pour aller dans les Alpes pour moi. Accord qui n’a semble-t ’il pas toujours été respecté…
Comme les aiguillages sont nombreux un peu partout, il est prudent de consulter le topo version 2023 , de Carine et Christophe Devaux / Girardin qui ont, à l'instar du frangin avec la machine à trous, ont mis également un max d'énergie pour nous concocter toutes ces éditions de topos. Ce qui est sûr, c’est qu’il y a tant de voies que vous devriez forcément arriver en haut.
N'oubliez pas que l'escalade est un sport aventureux qui se pratique sous la propre responsabilité du grimpeur qui s'y rend. Que ce soit au niveau de l'équipement en place et de son utilisation, du choix de l'itinéraire ou encore des dangers objectifs tels que chutes de pierres ou autres. Je décline toute forme de responsabilité ou toute mise en cause au cas ou un accident surviendrait dans l'une des nombreuses voies décrites dans ce site internet. Pour plus d'informations...Mesures de protection de la faune Galerie photo
|